Des prix justes, pour les paysan·ne·s et les consommateur·trice·s au Sud

Type de contenu

Documents

Publié le :

2 mai 2018

Ce qu’on ne paie pas ici

SOUVERAINETE_ALIMENTAIRE_expo_70x100cm_HD-16

quelqu’un en fait les frais ailleurs

La Suisse importe du fourrage de soja ou de maïs d’Amérique latine pour nourrir ses vaches. Ensuite elle exporte ses produits laitiers, comme le lait en poudre qui est vendu à bas prix dans le monde entier, concurrençant ainsi la production locale des pays du Sud. En plus de la pollution générée par les transports, ces exportations détruisent l’économie régionale des pays les plus pauvres.

Des prix justes,
pour les paysan·ne·s et les consommateurs·trice·s au Sud

La Suisse est le pays du chocolat, des vaches, du fromage, et de Nestlé. Prenons donc l’exemple du lait pour observer comment notre politique agricole agit au Sud.

L’appétit insatiable des
géants laitiers
L’abandon des quotas laitiers, en 2009, a provoqué en Suisse un chaos dans l’organisation du marché laitier national. Malgré la grève du lait d’alors, les prix n’ont cessé de chuter. Aujourd’hui, c’est l’impasse ! Il y a trois prix différents pour un même et unique lait de haute qualité (dont le cahier des charges est le plus strict du monde). L’obligation pour les producteurs et productrices de livrer le lait, même celui destiné au marché mondial sous forme de poudre de lait (payé à peine au-delà de 20 cts). Des contrats stipulant aussi l’interdiction de manifester. Une diminution d’un tiers des producteurs de lait de 2000 à 2012. Une augmentation considérable des importations de céréales fourragères à bas prix au détriment d’une production de fourrage locale. Un manque de volonté politique d’établir un cadre règlementaire.
Au-delà de nos frontières, les cultures industrielles intensives de céréales fourragères grignotent les forêts tropicales et les surfaces agricoles locale des petit·e·s paysan·ne·s. La poudre de lait et la montagne de beurre inondent les marchés mondiaux. Tout ça sur le dos des producteur·trice·s suisses et au détriment des producteurs·trice·s du Sud. A l’instar de la production colombienne et indienne de lait populaire, dont le marché local est menacé de destruction par les géants laitiers. Nestlé en occupe le premier rang au niveau mondial et prévoit d’augmenter à 45 % ses ventes provenant des marchés émergents d’ici 2020 et de doubler son chiffre d’affaire tous les trois ans en Afrique.

Le lait populaire prospère dans le monde malgré le dédain manifesté par les élites
En Colombie, chaque matin, 50 000 « jarreadores » ou vendeurs de lait convergent en moto vers les villes du pays, vendant ainsi 40 millions de litres de lait frais à quelque 20 millions de Colombiens qui vont le faire bouillir chez eux à un prix deux fois inférieur au prix du lait pasteurisé, conditionné et vendu dans les supermarchés. Mais en 2006, le gouvernement a promulgué un décret interdisant sa consommation, sa vente et son transport sous prétexte qu’il n’était pas hygiénique. Parallèlement, il entamait des négociations en vue d’accords de libre-échange avec des pays exportateurs de produits laitiers ! Des manifestations massives ont éclaté à travers le pays, repoussant les mesures du gouvernement à plusieurs reprises, en 2006, 2008 et 2010. L’opposition populaire a fait plier le gouvernement qui a reconnu le « leche popular » à la fois légal et essentiel dans un nouveau décret en 2011. Belle victoire ! Car en réalité le lait populaire issu de la petite production locale satisfait entièrement aux besoins des communautés, en étant acheminé sans grande difficulté, en toute sécurité, tout en créant de nombreux emplois. Ce secteur non structuré peut faire aussi bien que les géants laitiers, à condition de ne pas être concurrencé par les excédents de lait bradés sur le marché globalisé.

LEXIQUE

Quota : quantité limitée ou réglementaire (contingent) ; p.ex. pour éviter une surproduction de lait, les producteur·trice·s et/ou l’Etat peuvent mettre en place des quotas régionaux (montagne, plaine).


Retour


Suivant